Il y a quand même beaucoup de violence dans ce brouhaha (hum, j'étais pas sûre de l'orthographe de ce mot là) et dans les réactions de certains jeunes. Il y a des cours où c'est beaucoup le bordel. Ce matin l'un d'eux faisait le mariole (c'est un truc récurrent chez lui), et quand je le reprends, ce n'est pas lui c'est untel ou untel autre. Quand je lui parle, il me tient tête. Je lui demande de sortir prendre l'air dans le couloir. Il résiste, je dois argumenter dix minutes avant qu'il s'éxecute. Puis au bout de dix minutes, il toque à la porte, veut revenir dans le cours. Je fais pas attention à lui. Deux minutes après, il recommence. Puis il finit par s'énerver et cogne dans la porte et le mur. A la fin de l'heure, la sonnerie retentit. Il se fait ouvrir par un autre élève et revient. Je pourrais laisser courir, mais je veux lui signifier qu'il ne fait pas ce qu'il veut. Tu sais ce que c'est (ou pas), tu donnes un doigt et on te bouffe tout cru. Encore une fois, il me tient tête. Il me répond très agressivement. Finalement un de ces potes lui dit "calme-toi, on sort" et l'emmène avec lui.
J'ai du mal à comprendre. D'où vient cette violence. En plus je suis très loin d'être pénible ou autoritaire (c'est peut-être le hic). Certains élèves, je les fais sortir avec moi en fin de cours et je discute avec eux pour leur expliquer pourquoi je place certaines limites et ça fonctionne. Avec celui de ce matin, impossible. Il n'a jamais rien fait (même quand je l'interromps en flagrant "délit"), ce que je lui demande (se taire, sortir,...) ne sert à rien... Il m'a même dit que j'avais une mentalité de huit ans... Ah ah.
Bref, ce matin je me suis dit qu'il était à deux dois de m'en coller une. J'ai pas peur, je ne lui laisse pas le dessus. Peut-être que je devrais, avoir peur, je veux dire. Il y a un truc aussi, de mâle dominant (classe de trente garçons !). Il n'agirait jamais comme ça avec mes collègues hommes, même les plus cool d'entre eux. Je le sais. Et ça m'exaspère, ça me fout hors de moi, ce sexisme. Je dois repenser à l'image que je vais donner à mes nouveaux élèves l'année prochaine, revoir ma stratégie. Fait chier de ne pouvoir être soi-même. J'en ai ras-le-bol des masques. Mais bon, pour les premières qui passent en terminale, c'est plus ou moins foutu côté autorité je pense, je vais encore morfler avec eux l'année prochaine. Aussi, je ne mets jamais d'appréciations négatives sur leur comportement dans les bulletins. Je sais que ça peut flinguer leur "parcoursup". Peut-être que je devrais. J'en sais rien.
Bref (2). En rentrant chez moi ce matin, je me disais que ça valait peut-être pas la peine toute cette énergie pour rien, dépensée pour essayer de faire rentrer des trucs dans tous ces cerveaux. Y a quoi... Peut-être 1/3 intéressés ? Qui plus est, ce matin j'avais préparé des jeux pour leur faire réviser des trucs vus dans l'année. Stupidement, je m'étais dit que ça leur plairait. J'y ai passé quelques heures ce dimanche. Je suis trop conne.
Du coup je me demande. Vais-je continuer ? Ma collègue avec qui je suis en binôme sur 80% de mes cours me demande de rester. Je pense que je vais rempiler pour un an pour ne pas la laisser tomber. Et après, je sais pas. Pour moi ça vaut clairement pas le coup de risquer de se prendre une mandale par un gamin qui pense que tu es une carpette à sa disposition. Pour moi, ça vaut pas le coup de se fatiguer à préparer des trucs pour des gamins qui dorment de manière ostentatoire devant toi, et qui t'obligent à circuler en disant "réveillez-vous machin, réveillez-vous, truc"; ça vaut pas le coup de travailler pour une autre poignée qui passe les heures à rire bêtement, ne cherche pas les exos que tu leur as préparé, pour le 1% qui bouquine un roman en classe, pour le 2% qui révise son interro de l'heure suivante...
Et les quelques autres ? Tant pis, j'ai envie de dire. Je ne me sens pas une vocation de sauveuse de l'humanité. Franchement, être prof, c'est noble. Mais moi, je suis un être vil. Je m'en balek... Comme la majorité d'entre eux.